Le Président de la République a annoncé qu’un geste pourrait être fait pour les possesseurs de véhicules diesel. Sous cette déclaration se cache en fait un coup de pression supplémentaire à TotalEnergies. Malgré tout, le gouvernement ne se trompe-t-il pas de cible ?
Lors de son déplacement au marché de Rungis, Emmanuel Macron ne pouvait fuir l’actualité « carburants ». Le Président de la République a donc brièvement évoqué le sujet : « Je sais l’esprit de responsabilité de nos grands producteurs et revendeurs et je pense que c’est important dans une période où l’on a besoin d’accompagner nos compatriotes. Je souhaite que le dialogue entre le ministère et les entreprises concernées et comme ça avait été fait l’année dernière sur le carburant avec des ristournes à la pompe. C’est important dans une période dans laquelle on a besoin d’accompagner nos compatriotes et en particuliers celles et ceux qui travaillent ».
Le locataire de l’Elysée vise directement TotalEnergies, ne se cachant même plus de demander un nouvel effort au pétrolier qui a encore réalisé une année exceptionnelle en 2022. Il est vrai qu’en dehors de 2020, la plupart des exercices précédents ont été synonymes de milliards de bénéfices pour l’entreprise française. Mais elle pourrait bien en avoir bien marre de jouer le rôle de pansement sur une jambe de bois. Au point d’être tenté de réduire encore les raffineries françaises déjà en déclin ? Un sujet sur fond de social, qui pèse lourd dans la balance.
Surtout, un geste pour le diesel en 2023 a de quoi surprendre, alors qu’ils seront carrément interdits dans le Grand Paris dès 2025. Même si 60 % des véhicules circulant sur nos routes brûlent du gazole, ce carburant est voué à la disparition. Il faudrait alors maintenir en vie le diesel pour pallier l’urgence en demandant au secteur privé d’agir, mais de l’autre, demander aux automobilistes d’abandonner justement leur diesel pour passer à l’électrique. Difficile compromis.
Le contexte actuel fait que (presque) tout le monde se frotte les mains : l’Etat, d’abord, qui devrait recevoir plus de 45 milliards d’euros de recettes fiscales « grâce » à la flambée du coût du pétrole et des marges de raffinages. Comment ne pas se dire que le gouvernement a lui-même les cartes en main pour baisser le prix des carburants en jouant sur les taxes ? Mais Bercy et le ministère des Finances refusent catégoriquement. D’ailleurs, on attend toujours la fameuse voiture électrique à 100 € par mois sans apport, promise par le gouvernement.
Ensuite, nous avons évidemment les pétroliers, que l’on ne cite plus. Et puis ce troisième larron : les constructeurs ont eux aussi à peu près tous vu leurs marges exploser depuis 2020. Stellantis est d’ailleurs un des exemples les plus représentatifs avec, rien que sur le premier semestre 2022, 8 milliards d’euros de bénéfices nets, soit des marges dignes des meilleures années de Mercedes ou BMW. S’il faudra attendre ce 22 février pour la publication officielle, le géant franco-italo-américain ne devrait pas être très loin du résultat net de TotalEnergies… Et il n’est pas le seul dans ce contexte. Mais au milieu de l’Etat, des constructeurs et des pétroliers, le seul qui trinque, c’est celui qui tient le volant.
Plutôt que se concentrer uniquement sur TotalEnergies et faire une nouvelle fois preuve de court-termisme, pourquoi l’exécutif n’essaye-t-il pas aussi de dialoguer en parallèle avec les constructeurs du sujet des marges pour diminuer le prix des voitures électrifiées et accélérer la transition du parc automobile ? Il semble plus facile et populaire de taper sur TotalEnergies. Pourtant, la hausse des prix est une porte grande ouverte aux marques chinoises prêtes à prendre le créneau avec leurs électriques bon marché.
Et puis, comment demander aux automobilistes d’acheter un véhicule plus “propre” pour améliorer la qualité de l’air et accéder aux ZFE s’ils sont trop chers pour la majorité d’entre eux ? Bien entendu, les constructeurs avanceront le fait que le développement de tous ces nouveaux modèles électriques coûte très cher. Mais pour l’instant, les résultats nets de la plupart des groupes automobiles qui sont en forme ne reflètent pas vraiment des investissements si importants qu’ils pourraient les handicaper.
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